Ses sphères émeraudes gambadaient sur une porcelaine tendre et laiteuse qu'était la peau de celle qui plissait les dernières ondulations de l'étoffe claire qu'elle portait: sa robe de mariée. Combien de fois la future Burrows s'était perdue dans la contemplation de sa belle-sœur? Il y en avait eu trop pour les énumérer à l'instant. Glissant une épingle dans le chignon blond de la protagoniste, la brune intima à Sansa d'observer son reflet dans le miroir de la pièce. Se dressait dans celui-ci la silhouette sylphide d'une Hastings prête à réitérer la tradition familiale: épouser un riche parti soigneusement choisi par la matriarche de la lignée. La robe qui épousait ses formes lui allait ravir: une Vera Wang faite sur mesure dont la finesse et la souplesse de la dentelle qui en tissait le moindre centimètre carré étaient surprenantes. « Prête pour le grand jour? » S'enquit Lussy en offrant à son amie un sourire complice. Que pouvait-elle bien lui répondre? Elle refusait d'avouer la vérité à la cadette Burrows: elle avait déjà assez peiné pour se l'avouer à elle-même. Être amoureuse d'une femme qui se trouve être la sœur de son futur époux est une chose complexe et douloureuse à encaisser. Sansa avait toujours refoulé son attirance envers la gente féminine, mais l'arrivée de Lussy dans son existence avait réveillé ses désirs enfouis. « Prête. » Lâcha-t-elle dans un souffle en pinçant ses lèvres maquillées entre elles: quel mensonge! Néanmoins, ce n'était pas le premier. Depuis son plus jeune âge, on lui avait inculqué différents arts, tous crapuleux: celui de porter un masque, de camoufler ses émotions ainsi que celui de la fabulation. Malgré leurs complexités, Sansa jouissait d'une facilité à mentir déconcertante. « Je crois qu'il manque un peu de laque de ce côté. » Ce fut après ce nuage de fumée visant sa coiffure que Sansa rejoignit l'église où se déroulerait le plus beau mariage de l'année.

« Moi, Sansa Aurora Elizabeth Hastings, je te reçois Silas Reaver Valentin Burrows, comme époux et je te promets de te rester fidèle, dans le bonheur et dans les épreuves, dans la santé et dans la maladie, pour t’aimer tous les jours de ma vie. » Récita la blonde comme l'aurait faite une écolière avec une poésie risible et narcotique. Les prunelles de son concubin se fondaient dans les siennes pendant que les doigts de leurs mains étaient liés afin d'arborer aux yeux des invités présents dans le lieu saint la solidité de leur union. Malheureusement, celle-ci était inexistante puisque Sansa ne ressentait aucune once d'amour à l'égard de l'héritier. Si, certes, elle lui éprouvait de la sympathie et de l'amitié, seule la sœur du concerné détenait son amour. « Sansa, veux-tu être ma femme? » Un poids violent partit s'abattre sur le cœur de la demoiselle. Après que la phrase fatidique fut prononcée, de violents tremblements qu'elle ne pouvait réprimer assenèrent ses phalanges anguleuses. Silas se répéta avant que Lussy ne pose sa dextre sur l'épaule frêle de la Hastings afin de la presser et d'apporter via cette pression du réconfort, et du courage. Un silence monacal régnait sur l'église, malgré les chuchotis qui s'élevaient depuis les places assises. « Silas, je... » Les fesses refaites des douairières présentes à la cérémonie venaient de se relever des bancs pour ouïr sa réponse: le bruit de leurs tailleurs Chanel se frottant contre le bois du meuble avait été audible, même pour l'héroïne et ses mètres de distance. Malheureusement, elles n'eurent qu'un sanglot avant de mirer de leurs yeux effarés la fuite de la mariée.